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Blog de la section PS Anzin

Harcèlement social

31 Mai 2010 , Rédigé par José Pressoir Publié dans #Information

Harcèlement social

On peut penser que les 60 ans sont un leurre, et qu’on ne coupera pas à travailler plus tard et plus longtemps dans un monde impitoyable.

 Ensuite, il y a la manière, et celle-ci n’y est pas.

 

 

Le pouvoir manque de classe en titillant les nerfs et le moral des salariés à chaque humiliation.

 Manifs dépeuplées, méthode validée, entend-on depuis jeudi au gouvernement, comme s’il s’agissait de cela?

En réalité, c’est le fond d’une réforme qu’on fait passer par la défaite du mouvement social, sans autre argument que la résignation.

Cette manière de distiller des possibles et des plus jamais à petite dose, de jongler avec des "61, 62, 63 ans" et "on verra tout ça", conclut Eric Woerth qui sait toujours où il va…

Cette façon de jurer que rien n’est acté mais l’on devine que tout est déjà écrit, et l’on joue avec les médias, et on fait donner l’UMP, et l’on force les syndicats à se battre contre des nébuleuses, un projet voilé qui se dérobe, et l’on pose des banderilles, et le taureau social pliera le genou avant même l’estocade?

Jamais réforme aussi importante n’aura été aussi peu négociée, discutée, débattue réellement.

 On n’est pas dans une pédagogie contradictoire, où le pouvoir arriverait avec un projet public qu’il soumettrait au dialogue ou au feu syndical, puis à l’épreuve parlementaire.

 On assiste à l’installation d’une évidence par le harcèlement social.

 Encore quelques semaines et la France aura acté le premier vrai recul social de son histoire,

peut-être inévitable, mais sans jamais en avoir débattu collectivement.

 

C’est notre exception. Le pouvoir n’agit pas à l’allemande, en dialogue avec des syndicats respectés. On dira que nos centrales, gribouille des manifs minoritaires, n’ont pas les forces ni la capacité à négocier, qui engendre ce respect? Au moins pourrait-on espérer, de cette droite qui réforme, une offre claire, une confrontation idéologique assumée, droite contre gauche, ou la revendication de la frugalité que le monde nouveau impose?

Mais Nicolas Sarkozy se dérobe encore au grand discours qu’il doit au pays, sur les temps difficiles et les vaches maigres du déclin.

 Il se contente d’espiègleries sur Mitterrand ou les 35 heures (qu’il n’a d’ailleurs jamais supprimées) : des petites phrases pour apaiser les digestions mentales d’une droite de supporters.

C’est dommage, tant cela manque de panache. Dangereux aussi, car à réformer sans convaincre ni vaincre, on ne fait rien accepter.

On conforte les gens dans l’idée que la réforme est punitive et que toute revanche sera juste à prendre. On transforme la CFDT en orga de boutefeux – la CFDT qu’on disait prête, jadis, à débattre du poids des chaînes en cas de rétablissement de l’esclavage ! On conforte aussi la gauche, qui ne demande que ça, dans les mensonges qu’elle s’invente. On provoque le salariat à choisir entre la mélancolie et la rue.

 Pour l’instant, dira-t-on, c’est toujours moins violent que Maggie Thatcher, qui avait assassiné la classe ouvrière pour sauver son pays ou l’idée qu’elle en avait.

 Ici, on n’assassine pas, on épuise, on méprise.

Claude Askolovitch - Le Journal du Dimanche

Claude Askolovitch
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